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GUY DANEL

Sans la rencontre avec Pierre Penassou - illustre violoncelliste du Quatuor Parrenin puis du Quatuor Bernède - sans doute j’errerais actuellement dans une salle de cours, un bureau ou une administration, ou peut-être un rabot ou une équerre en main, heureux d’honorer le mieux possible la tâche qui me serait confiée.

Ces premières années à Reims, au-delà de l’amour de la musique que Penassou a su insuffler à ses élèves, représentent la rencontre avec le quatuor à cordes et sa littérature, et entre deux exercices de Feuillard, Rosamunde ou l’Américain, Webern et Beethoven résonnaient dans la salle, colorés par les assertions passionnées du Maître. Et il semblait naturel à notre génération d’aller encore innocents écouter notre cher professeur dans l’intégrale des quatuors de Bartok que le Quatuor Parrenin fut le premier à présenter en France, ou encore « Ainsi la Nuit » dont ils firent l’avant-première. Samson François, Boulez et le « Domaine Musical », Portal, Xenakis, Scelsi et tant d’autres : autant de noms qui régulièrement émaillaient les propos de Pierre Penassou.

Reparti vers le plat pays côté France, terre de mes ancêtres, je poursuivais gentiment mon apprentissage auprès d’un professeur que je remercie encore pour son intégrité. Claude Brion. A l’époque où les provinciaux se doivent de rejoindre la capitale, je retrouvais la même probité chez Yvan Chiffoleau.

Admis par hasard à l’Opéra de Bruxelles à 20 ans, et alors que l’on me demandait de m’assoir à côté du soliste, j’ai eu la chance d’accompagner Zerline dans Don Juan, riait des déboires de Falstaff et par contre me voilait la face à l’évocation de l’infanticide commis à l’égard de l’enfant de Jenufa.
Mais après 7 saisons, le quatuor me rattrapa et je fondais le Quatuor Danel. Et ce fut alors des rencontres à foison avec d’éminents professeurs : Quatuor Amadeus, Quatuor Borodine, Walter Levin (Quatuor Lasalle), Fiodor Droujinine (Quatuor Beethoven), Hugh Maguire (Quatuor Allegri) et bien sûr Pierre Penassou. Les quelques prix internationaux récoltés leur sont dus.

Suite à cette période concentrée sur l’accueil et l’appropriation de cet héritage unique, les années suivantes furent marquées par la préparation d’intégrales (Beethoven, Bartók, Chostakovitch, Weinberg), les enregistrements, et aussi le travail avec les compositeurs dont certains restent très présents dans mon quotidien : Lachenmann, Goubaïdoulina, Dusapin, Harvey, Raskatov, dont le nom vous dira sans doute quelque chose, mais aussi parmi d’autres Baschet, Bedrossian, Boesmans, Brewaeys, Defoort, Deregnaucourt, Fafchamps, Hoenderdos, Mernier, Van der Harst… Qu’un petit tour sur la toile vous permettra de découvrir.

Dans un groupe de quatre, il est assez aisé d’être minoritaire, et ma collaboration avec le quatuor que j’avais fondé vingt ans auparavant s’est interrompue en 2013. Alors je m’attache à partager mes rêves avec mes successeurs que je retrouve au Conservatoire de Bruxelles, ou également dans le cadre des activités des associations dans lesquels je m’implique : Concerts en Nos Villages, Association Rencontre Arts et Musique, ou encore Chamber Music for Europe.
Et finalement, les Trios de Beethoven, les Sonates de Mendelssohn ou Lied III d’Hosokawa n’ont rien à envier à certains répertoires du quatuor